Selon une large étude de Reporterre, après vingt années de financement pour la recherche sur les semences OGM en Afrique, la Fondation des célèbres philanthropes américains ne rencontre pas l’effet escompté. En effet, seuls les OGM originaires des Etats-Unis dans les années 1980 seraient finalement utilisés en culture.
Avec de nombreux rassemblements pro-OGM mobilisés au Kenya et en Ouganda depuis début 2023, Mark Lynas se félicite sur X de cette « première marche en faveur des OGM en Afrique ». De quoi faire sourire lorsque l’on note que ces événements ont été organisés par Weplanet Afrique, cofondé par ce même Mark Lynas. Il s’agit en effet du stratège en communication pour Alliance for Science, organisme dédié à la promotion des OGM en Afrique et financé principalement par la Fondation Bill & Melinda Gates (BMGF), à hauteur de 10 millions de dollars en 2020.
Weplanet, également actif en Europe en pesant sur la législation européenne entourant les nouveaux OGM, permet le rassemblement en Afrique afin de réagir aux différents mouvements anti-OGM qui sévissent dans plusieurs pays. En effet, des décisions gouvernementales favorables aux biotechnologies sont venues mettre le feu aux poudres.
Tandis que les décisions politiques se succèdent depuis 2022 sur la position des pays africains à l’importation et la culture d’OGM, un bilan sur les trente années écoulées serait révélateur. L’Afrique du Sud est la seule à cultiver depuis 1997 des variétés génétiquement modifiées de soja, de maïs et de coton, mais peine à être rejointe par d’autres pays du continent.
Alors, l’aide au développement agricole finance depuis vingt ans des projets aussi bien publics que privés, dans l’idée de développer des semences génétiquement modifiées (GM) plus adaptées au continent. Les acteurs majeurs de ces financements sont notamment la BMGF et l’Agence des États-Unis pour le développement international (Usaid).
Le grand gagnant de ces aides, c’est plus spécifiquement Bayer-Monsanto. Tandis qu’en vingt ans 400 millions de dollars sont allés au financement de recherches pour ces semences à destination du développement agricole africain, 223 millions de dollars viendraient de la seule BMGF. Curieusement, la majorité des recherches financées seraient faites en dehors du continent ou avec un partenaire effectivement extérieur. Ainsi, les financements ne profiteraient pas tant à la recherche africaine qu’à des institutions de recherches occidentales. Ce sont par exemple 43 millions de dollars qui seraient versés par la BMGF à l’université du Michigan. La Fondation africaine pour les technologies agricoles (AATF), développant des partenariats entre la recherche africaine et les firmes biotechs, aurait reversé une large partie de ses financements à Bayer-Monsanto, et serait ainsi son premier bénéficiaire.
Selon l’universitaire Joeva Sean Rock de l’Université de Cambridge, « Les projets sont souvent organisés en fonction de ce qu’une entreprise privée peut offrir — et pas nécessairement de ce dont les agriculteurs africains ont besoin ou veulent — et peuvent donc conduire à des priorités mal adaptées. »
Ce sont alors 60% des projets sur le continent qui seraient abandonnés. Cependant, la chercheuse nuance l’échec de ces recherches en admettant aussi que « la sélection des plantes est délicate, surtout lorsqu’il s’agit de caractères multigéniques, comme c’est le cas pour de nombreux projets de cultures génétiquement modifiées en Afrique. La science n’est tout simplement pas aussi avancée que ne le laisse entendre le battage médiatique ».
Alors, des progrès sont encore nécessaires et la science n’est pas aussi optimale que le voudrait l’imaginaire collectif aujourd’hui. Cependant, ce sont aussi des choix portés sur les investissements qui viennent fausser nos perceptions. Tandis qu’il est possible de communiquer avec une machine dans différentes langues grâce à l’IA, le choix de cultures en terres d’Afrique est encore complexe.