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« Publier n’est pas un crime »

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Voici l’appel des cinq médias qui ont décidé de retourner leur veste et de soutenir Julian Assange : « Il y a douze ans, le 28 – 11 – 2010, nos cinq organes de presse de rang international (The New York Times, The Guardian, Le Monde, El Pais et Der Spiegel) s’unissaient pour publier, en collaboration avec WikiLeaks, une série de révélations reprises par les médias du monde entier.


Plus de 251 000 télégrammes diplomatiques émanant du département d’État des États-Unis furent rendus publics au cours de ce “Cablegate”, jetant la lumière sur plusieurs affaires de corruption, scandales diplomatiques et opérations d’espionnage à l’échelle de la planète… Pour le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, ce “Cablegate” et plusieurs autres “ leaks” ou fuites de documents sensibles ont eu des conséquences extrêmement graves. »

« Le 12 avril 2019, Julian Assange, sous le coup d’un mandat d’arrêt américain, a été appréhendé à Londres. Depuis déjà trois ans et demi, il est détenu sur le sol britannique, dans une prison de haute sécurité qui abrite normalement des terroristes ou des membres de groupes liés au crime organisé. Il risque d’être extradé aux États-Unis, où il encourt une peine allant jusqu’à cent soixante-quinze ans d’incarcération dans une prison de très haute sécurité.

Notre groupe de rédacteurs en chef et de directeurs de publication, qui ont tous eu l’occasion de travailler avec Julian Assange, a jugé nécessaire de critiquer publiquement son attitude en 2011 lorsque des versions non censurées des télégrammes diplomatiques ont été rendues publiques, et certains d’entre nous restent préoccupés par l’allégation figurant dans l’acte d’accusation américain selon laquelle il aurait aidé à l’intrusion informatique dans une base de données classée « secret-défense ». Mais nous sommes solidaires aujourd’hui pour exprimer notre grande inquiétude face aux poursuites judiciaires sans fin que subit Julian Assange pour avoir recueilli et publié des informations confidentielles et sensibles…

Mais cette vision des choses a évolué sous le mandat de Donald Trump : le département de la justice s’appuie à présent sur une loi remontant à plus d’un siècle, l’Espionage Act de 1917. Conçue pendant la Première Guerre mondiale pour pouvoir assigner en justice de potentiels espions, cette loi fédérale n’avait jamais été utilisée à l’encontre de journalistes, de médias ou de diffuseurs. Un tel acte d’accusation crée un précédent dangereux, menace la liberté d’informer et risque de réduire la portée du premier amendement de la Constitution des États-Unis. »

Un précédent dangereux

« … Recueillir et diffuser des informations sensibles constitue de même une part essentielle du travail de journaliste au quotidien, lorsque cette divulgation s’avère d’intérêt public. Si ce travail est déclaré criminel, alors non seulement la qualité du débat public mais aussi nos démocraties s’en trouveront considérablement affaiblies.
Douze ans après les premières publications liées au “Cablegate”, le temps est venu pour le gouvernement des États-Unis d’abandonner ses poursuites contre Julian Assange pour avoir publié des informations secrètes. Publier n’est pas un crime. »

L’Observatoire du journalisme : ce retournement des médias est l’hommage du vice à la vertu

Le Monde a la mémoire sélective et feint de ne pas se souvenir que Assange a été abandonné par les médias dominants. Julian Assange est devenu le méchant lanceur d’alerte qui met « l’Occident en danger ». Entendez par Occident le monde libéral libertaire dominé par les États-Unis et leurs intérêts matériels et moraux.

Julian Assange considère que le rapport à l’information est profondément asymétrique en ce sens que les États sont toujours dans une position de dominants. Eux seuls, avec les réseaux sociaux californiens, sont capables de créer et de cacher de l’information aux yeux de milliards d’êtres humains ; c’est pourquoi le cyberactiviste australien a consacré sa vie à tenter d’inverser ce rapport par le « hacking » et la divulgation publique de ces informations masquées. C’est le rôle du lanceur d’alerte. Le journaliste relaye ces informations à un large public tout en protégeant sa source. Aujourd’hui, qui protège encore Julian Assange ? Aux États-Unis comme en France, la classe médiatique a tourné le dos à celui qu’elle devrait protéger. Le journaliste Brésilien Pepe Escobar, très impliqué dans l’affaire Assange, rappelait que « Le Monde a profité des révélations de 2010 de Julian Assange, tout comme Der Spiegel, El País, The Guardian et le New York Times. Après, ils ont fait un 180 degrés et, comme les autres journaux, ils ont commencé un processus de dénigrement et de diabolisation de Julian Assange. »

Ne négligeons pas l’appel des cinq représentants du monde libéral pour libérer Assange, mais n’oublions pas qu’il est en prison en partie de par leur manque de soutien et leur diabolisation du lanceur d’alertes.

NDLR : On peut se demander pourquoi ce retournement de veste des médias. La difficile réélection d’un candidat démocrate à la présidentielle y serait-elle pour quelque chose ?

Le Média en 4-4-2.



Source

RESIST CAEN
Author: RESIST CAEN

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